Oikos, Logos.
(Maison, Compréhension)







Je peux pointer du doigt les grands méchants et leurs innombrables combines destructrices.
Je n'ai pas assez de doigts.

Nous sommes tous des fous.

Fous de croire que parce qu'on est éveillés, responsables, éduqués, respectueux, pacifiques, humanistes.

Fous de croire que nos jardins perma c'est des jardins d'Eden où tout le monde il est gentil.

Prend une loupe et regarde la baston. La permaculture c'est aussi l'observation du vivant.

Et moi le vivant je l'observe. Le vivant c'est une lutte pour la survie, le vivant mange ou est mangé. Le vivant meurt et trucide, pourri ou moisi, cannibalise ou exploite. Le vivant ne se préoccupe pas de justice, de sociologie, d'être équitable, d'être responsable. Le vivant ne juge pas. Le vivant est brutal et impitoyable. Autant que l'homme, si ce n'est plus. Le vivant ne crois pas.

C'est l'homme qui crois. Des fois même, il crois qu'il a raison.

Dans ton mulch, sous la paille, c'est la guerre, c'est la mort, c'est la vie qui mange la mort.
Et toi tu trouves ça chouette. Tu crois que ce chaos apocalyptique de chaque instant c'est magnifique.

Vas-y explique.

Tu envies le ver de terre de bouffer des trucs décomposés en attendant de tomber sur un piaf ?
Tu envies le piaf de manger des vers bien goûteux en attendant de croiser mon chat ?
Tu envies le hérisson d'avoir à supporter des tiques et des puces toute sa vie sans pouvoir se gratter les fesses sous peine de finir en passoire ?
Tu as envie d'être un légume pour te faire grignoter les feuilles et les racines et si tu ne t'en sors pas trop mal, finir, dans l'eau bouillante, un bocal ou dans un congélo sauf si tu es bouffé cru?
Tu as envie d'être rongé par le mildiou ou poser ton séant sur une fourmilière pour vérifier que l'amour que tu donnes est réciproque ?
C'est pas un jardin ton truc, c'est Jurassik Park. Tu fais juste le malin parce que tu es plus grand que tout le monde et qu'au final c'est toi qui prendra des kilos, c'est tout.
Tu flippes pour le réchauffement climatique, mais ton jardin il flippe parce que tu te balades dans les allées. Tu es perma, tu es une catastrophe biologique à toi tout seul.

On est là, gna-gna-gna regarde mon mulch comme il est beau, auto-fertile et tout. C'est bien un point de vue humain ça. La vie elle grouille en dessous... Tu as vu ce qui grouille ? Vas-y dors dedans: tu vas voir comment la vie, elle va te malaxer les muqueuses pendant la nuit. Tu crois que ton jardin il a pas envie de te composter ? Il ne demande que ça, mais tu es toujours en mouvement, il n'a simplement pas le temps de te tuer.
Il attend, il t'aura à l'usure c'est tout.
Tu crois que vu d'en bas les bestioles elles se disent: "Oh regardez comme il est mignon est gentil et bienveillant avec nous ?" Que dalle, ça chuchote: "Laisse le venir..." ou "Aux abris !!!" entre les cris d'agonie des blessés et des mourants.

Faut être chtarbé pour voir de la poésie et du bucolique là dedans.

Respecter la nature ne veut pas dire que nous avons les plans Ikea du paradis.
Respecter la nature c'est simplement, installer un champs de bataille, créer les conditions du conflit et distribuer des armes.

Et notre place dans la nature, c'est l'éphémère.
Comme dans nos jardins.

Nous ne servons finalement qu'à une seule chose, entretenir un cycle. Et à l'échelle du temps, le cycle de l'humain est très court. Nos cris, nos peurs, nos réflexions, nos idéaux, nos croyances à cette échelle ne sont qu'une brève anecdote qui n'a peut-être même pas lieu d'être, me raconte pas ta vie, je ne l'écoute pas et j'ai rien pour noter sur moi.
C'est une illusion de l'esprit, des furtives hypothèses complètement fausses que le vivant permet. La conscience qui nous caractérise et pour laquelle on se bat, n'est en définitive que du bruit, la terre s'en fout, elle s'en bat la lune. L'échelle du temps ne nous donne presque pas d'existence au point de nous rendre même improbable, l'humanité c'est un gaz d'indigestion pour elle. une bonne gastro là dessus et elle va pouvoir reprendre ses affaires.
Quand à l'échelle des distances nous sommes coincés dans un infiniment grand et un infiniment petit qui nous dépassent... ...à l'infini et où la vie elle même n'existe que dans un espace imperceptible, la terre ne nous a probablement même pas vue, on lui dit "Je t'aime" avec les plus beaux de nos mots elle se dit "mais qu'est que c'est cette merde qui me gratte". 

En gros on ne devrait même pas être là.

Dit comme ça, la lutte pour le réchauffement climatique, pour une société humaine dans l'équilibre cosmologique, c'est presque risible d'illusions. C'est un crissement de grain de sable, alors que c'est la dune toute entière qui bouge pendant que le désert se déplace.

Notre interface est ridicule, toute la complexité de la pensée humaine, l'incroyable ingéniosité que nous procurent nos sens sont en définitive bien peu de choses. C'est le code morse à l'heure de l'internet quantique.

Ouvrons tous nos sens. Comprenons. Nous avons eu la chance de nous souvenir du miracle qu'est le printemps, connaître pour certains la profusion de l'été, nous vivons la tristesse d'un automne, et là l'hiver arrive. Nos questions existentielles c'est juste l'épisode 3184 des feux de l'amour. 

Nous ne pouvons rien contre les cycles.
Rien contre la rigueur de l'hiver.

Mourrons en silence au fond du jardin sans en faire tout un plat.
Un peu de dignité MERDE.

Je vous laisse, je vais vérifier sous la paille que tout le monde se bouffe bien la gueule comme il se doit.



Commentaires

  1. Merci de nous remettre à notre toute petite petite place, Zeb..
    Mais tout de même, laisses nous un peu de nos rêve, même si la vie n’est qu’une immense bataille comme tu le dis si bien.
    Biz

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  2. sauf que ce champ de bataille a son équilibre ... l'humain doit trouver comment faire partie de ces cycles, "se laisser composter" ! Sauf que l'humanité refuse la mort et se donne les moyens de la refuser ... jusqu'à ce que les limites de notre environnement nous rappellent le prix à payer pour ce refus, certes. Mais ne méconnaissons pas la capacité des gens de pouvoir de survivre et de se maintenir dans des conditions de survie extrêmement compliqué. Tant qu'il y aura un champ de ruine sur lequel régner, il y a aura des régnants. La Terre ne disparaîtra pas ... je parie sur le fait que les gens de pouvoir sont tout à fait capable de sacrifier l'humanité pour survivre au sommet de la pyramide.

    c'est la seule question : pourquoi l'humain se retourne contre les cycles de son environnement, ce que ne fait aucune autre espèce ?


    Notre conscience n'est pas notre apanage, c'est simplement une fenêtre ouverte sur le monde et à travers nous, l'univers parle. Alors, notre existence corporelle aura une fin mais "rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme".


    Mon pari est que si l'on parvient à réintégrer les cycles de notre environnement sans attendre que ce dernier ne nous y force par massacres généraux ; nous pouvons avoir la capacité d'accepter collectivement la mort et de ce fait, d'améliorer le vivant, considérant que nous le pouvons...

    peut-être, peut-être pas

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